dimanche 29 juin 2008

Enfants soldats: le problème des filles (*)

Aujourd’hui, plus de 300'000 enfants de moins de 18 ans luttent comme combattants, aux côtés de forces gouvernementales ou d’opposition, dans plus de 30 pays dans le monde. C’est en Afrique que les forces et groupes armés recourent le plus aux enfants soldats, dont le nombre est officiellement estimé à 120'000. L’utilisation des enfants soldats n’est pas sexuellement neutre: bien que la plupart des enfants soldats soient certes des garçons, la proportion moyenne de filles s’élève à 1/3 contre 2/3 de garçons. Les filles sont pourtant rarement reconnues comme enfants soldats : c’est ainsi qu’on parle souvent de « filles invisibles ». Parmi les enfants impliqués dans des conflits armés à l’échelle mondiale, on ne compte pourtant aujourd’hui pas moins de 120’000 filles. En novembre 2004, des filles engagées dans des forces armées combattaient dans au moins 13 pays, à savoir : le Burundi, la République démocratique du Congo, la Côte d’Ivoire, le Libéria, le Soudan, l’Ouganda, la Colombie, l’Inde, l’Indonésie, le Myanmar, le Népal, le Sri Lanka, ainsi qu’Israël et les territoires occupés palestiniens. Le problème des filles présentes dans les forces armées et groupes rebelles n’a pas bénéficié d’une attention suffisante jusqu’ici. Dépasser la vision réductrice qui associe traditionnellement l’enfant soldat au garçon armé et assurer la visibilité des filles est indispensable pour mettre en oeuvre des programmes d’aide appropriés, qui permettront la démobilisation et la réintégration de tous les acteurs du conflit.

L’augmentation massive des enfants soldats est directement liée au changement de la nature des conflits, devenus en grande majorité internes, et à la prolifération des armes légères. En outre, lors d’un conflit, l’insécurité généralisée, mêlée à des conditions économiques et sociales difficiles, pousse un grand nombre de jeunes à se militariser pour survivre, y compris les filles. C’est parfois pour fuir des violences domestiques ou sortir d’une position d’exclusion et de subordination dans laquelle les confinent leur communauté que les filles décident de s’enrôler. L’attrait d’un certain statut socialement reconnu et respecté peut aussi motiver certaines jeunes filles, en quête d’indépendance, qui revendiquent un traitement égalitaire entre hommes et femmes, par exemple aux Philippines et au Sri Lanka. Les enfants constituent des atouts militaires considérables pour les groupes armés. Faciles à manipuler, motiver ou intimider, ils se montrent plus obéissants que les adultes, s’adaptent mieux à leur nouvel environnement et coûtent moins cher. Ainsi, beaucoup de groupes armés (RUF en Sierra Leone, ARS au Nord de l’Ouganda ou encore la FRPI au Congo pour n’en citer que quelques uns) ont pratiqué des enlèvements massifs d’enfants, garçons comme filles, afin de renflouer leurs rangs. Même si les groupes rebelles ont manifestement une tendance plus prononcée à recruter des filles soldats, ces dernières sont cependant utilisées dans toutes les forces et groupes armés, qu’il s’agisse d’armées gouvernementales, d’organisations paramilitaires ou de milices. Les filles intéressent particulièrement les groupes armés, puisqu’elles s’acquittent de toutes les tâches domestiques nécessaires au soutien de l’effort de guerre. Elles remplissent des fonctions multiples, qui souvent se cumulent ; cuisinières, porteuses de munitions ou d’armes, guets, espionnes, informatrices, messagères, elles sont généralement contraintes de fournir également des services sexuels aux combattants. Ce sont là sans doute les activités les moins militarisées et donc les moins visibles. Cependant, contrairement aux idées reçues, les filles participent aussi au combat. Les études réalisées sur le terrain ont révélé en effet qu’en 2002, la moitié des filles faisant partie de forces armées décrivaient leur rôle premier comme celui de combattantes sur les lignes de front. En Sierra Leone, le RUF avait créé les « Small Girls Units », rangs spéciaux composés de filles âgées de 6 à 15 ans, utilisées pour des tâches ménagères et d’appui militaire mais dont la plupart avait subi un entraînement militaire préalable.


La lecture des textes juridiques en la matière révèle que le droit international n’a pas encore réellement intégré la dimension du problème des filles impliquées dans les conflits armés. Celles-ci ne sont en effet pas traitées de manière autonome par les instruments juridiques pertinents, puisqu’elles appartiennent légalement à la catégorie des enfants. Le droit humanitaire fixe à 15 ans l’âge minimum pour le recrutement et la participation d’enfants dans les conflits armés internationaux comme non-internationaux, standard qui s’applique à toutes les parties au conflit, gouvernementales ou non. La Convention relative aux droits de l’enfant reprend et réaffirme les règles fixées par le droit humanitaire, tandis que son Protocole concernant l’implication des enfants dans les conflits armés relève de 15 à 18 ans l’âge minimal de la participation des enfants aux hostilités, et ce également pour les groupes armés. Instrument clé en la matière, le Protocole ne fait cependant ni référence aux filles, ni distinction de genre, et ce même lorsqu’il aborde les programmes de démobilisation. Seuls les Principes du Cap adoptés à l’issue d’une conférence internationale sur les enfants soldats tenue en 1997 en Afrique du Sud, repris et développés par les Principes de Paris en 2007, mettent en évidence la situation particulière des filles. On y trouve notamment une définition de l’enfant soldat, à savoir « toute personne âgée de moins de 18 ans faisant partie d’une force ou d’un groupe armé, régulier ou irrégulier, à quelque titre que ce soit, par exemple en tant que cuisinier, porteur ou messager, ainsi que toute personne accompagnant ces groupes autres que les membres de la famille, y compris les filles recrutées à des fins sexuelles et de mariage forcé. Le terme enfant soldat ne s’applique donc pas uniquement à un enfant qui porte ou a porté les armes ». Cette définition, unanimement acceptée par l’UNICEF et un grand nombre d’ONG actives dans le domaine de la protection de l’enfance, rompt clairement avec l’image stéréotypée des enfants soldats. L’adoption d’une définition contraignante de l’enfant soldat, qui se base sur les ces Principes paraît aujourd’hui indispensable.


Du point de vue pénal, les Statuts de la Cour pénale internationale (CPI) et du Tribunal spécial pour la Sierra Leone (TSSL) considèrent la conscription ou l’enrôlement d’enfants de moins de 15 ans dans les forces armées comme un crime de guerre engageant la responsabilité pénale individuelle des auteurs. Le TSSL a par ailleurs confirmé le caractère coutumier de ce crime. La décision de confirmation des charges, rendue à la CPI le 29 janvier 2007 dans l’affaire Lubanga, spécifie que ce dernier est accusé d’avoir enrôlé et fait participer des enfants au conflit armé en Ituri, garçons comme filles. Il faut relever encore que les mandats d’arrêt à l’encontre de Germain Katanga, Mathieu Ngudjolo Chui et Bosco Ntaganda comportent tous un chef d’accusation en relation avec leur rôle dans le recrutement d’enfants.


Après un conflit armé, la réadaptation à la vie civile des filles associées aux forces armées revêt une importance déterminante sur leur identité future et sur leurs perspectives d’avenir en tant que femme. Or, les opérations d’aide internationale ont trop souvent négligé les besoins particuliers des filles dans la mise en place des programmes DDR (désarmement – démobilisation – réintégration). Les expériences DDR entreprises depuis 2000 ont en effet permis à la communauté internationale de prendre conscience, enfin, de la nécessité de tenir pleinement compte des filles dans le processus de paix, en tant que groupe distinct.


Les critères d’éligibilité aux programmes DDR ont généralement été établis de manière trop étroite, alors que la définition des personnes qualifiées comme « combattants » doit impérativement être élargie pour comprendre dans son acception les personnes qui remplissent des fonctions auxiliaires. En effet, seule une définition suffisamment large permettra de garantir une approche du genre et la participation des filles au processus DDR. Le récent succès des programmes DDR au Libéria est justement attribué en partie à un élargissement de la définition de combattant, qui a nettement facilité l’entrée des filles dans les structures mises en place. Renverser le phénomène d’exclusion des filles passe aussi par l’identification des obstacles à leur participation. Beaucoup d’entre elles ne souhaitent pas révéler officiellement leur identité militaire car elles sont souvent victimes d’une stigmatisation et d’une marginalisation de la part de leur famille, parfois de la communauté toute entière. Ainsi, un travail de proximité avec les communautés permettra une meilleure réinsertion des filles, notamment avec des associations nationales de femmes. Enfin, le fait d’avoir appartenu à des forces armées a souvent permis aux filles d’acquérir des compétences et aptitudes nouvelles qu’il convient de prendre en considération dans l’effort de reconstruction post-conflictuelle.


Régine Gachoud**


* Cet article a été publié dans le Journal de TRIAL n° 16 (juin 2008, pp. 11-12), disponible à l’adresse web suivant : www.trial-ch.org/fileadmin/user_upload/documents/BI/BI16frweb.pdf ; © TRIAL et Régine Gachoud.

**Régine Gachoud est juriste au Bureau du Procureur du Tribunal spécial pour la Sierra Leone. Les opinions exprimées dans cet article sont uniquement celles de l’auteur. Elles ne reflètent pas le point de vue et n’engagent ni TRIAL ni les organisations avec lesquelles l’auteur est liée.

Le mariage forcé enfin reconnu comme crime contre l’humanité

Par Anne Althaus

Le 22 février 2008, la Chambre d’appel du Tribunal spécial pour la Sierra Leone (TSSL) a reconnu que les mariages forcés reprochés aux trois accusés Brima, Kamara et Kanu dans l’affaire du groupe armé « Conseil Révolutionnaire des Forces Armées » (AFRC), constituaient un crime contre l’humanité.

Cela faisait bien longtemps que le débat était ouvert au sujet de la criminalisation des mariages forcés perpétrés durant des attaques contre la population civile et plus généralement en temps de conflits armés. Pour la première fois dans l’histoire du droit international pénal, le mariage forcé a été reconnu par la plus haute instance d’un Tribunal mixte – aux conditions que nous évoquerons ci-dessous – comme un crime à part entière, distinct de l’esclavage sexuel.

Ce jugement en appel du TSSL est donc historique. Il ouvre de nouvelles perspectives de poursuites et de réparation pour les femmes victimes de telles atrocités, non seulement en Sierra Leone mais dans d’autres régions affectées. Pour les nombreuses femmes qui ont enduré ces sévices durant le conflit qui a fait rage en Sierra Leone de 1991 à 2002, et que l’on a stigmatisées sous le nom de « Bush Wives » (épouses de la jungle), cette décision est certainement à marquer d’une pierre blanche.

Revenons brièvement sur l’évolution du concept de mariage forcé, avant de résumer la définition juridique qu’en a donnée la Chambre d’appel du TSSL.

Il n’est plus à démontrer qu’en cas de conflits armés ou d’attaques contre la population civile, les femmes sont presque toujours victimes de violences, notamment sexuelles : viol, prostitution forcée, ou encore esclavage sexuel sont perpétrés dans un but stratégique (répandre la terreur ou démoraliser l’opposant) ou encore dans celui de « divertir » les combattants.

En plus de ces atrocités, les mariages forcés ont souvent été dénoncés par des organisations de défense des droits de l’homme. Ainsi, le mariage forcé était une forme commune de violences contre les femmes durant le génocide au Rwanda. Cependant, si dans l’affaire Akayesu le Tribunal pénal international pour le Rwanda avait estimé que le viol et autres formes de violences sexuelles décrits par les victimes lors du procès incluaient, en autres exactions, des mariages forcés, ces derniers n’avaient pas été reconnus comme crimes distincts des autres formes de violences sexuelles.

Quant au Statut de Rome de la Cour pénale internationale (CPI) de 1998, il ne mentionne pas la notion de mariage forcé.

Le Statut du TSSL est calqué à cet égard sur le Statut de la CPI, comme celui-ci représentait alors la codification la plus récente en matière de crime contre l’humanité. Il ne mentionne donc pas le mariage forcé dans ses dispositions.

Néanmoins, une Chambre de première instance du TSSL avait approuvé, par décision du 7 mai 2004, une motion du Procureur visant à ajouter le chef d’accusation de « mariage forcé » sous la qualification juridique d’ « autres actes inhumains » (article 2 lit. i du Statut du TSSL) à l’encontre des prévenus dans l’affaire AFRC. La Chambre de première instance avait cependant plus tard considéré, dans son jugement du 20 juin 2007, que le crime d’« autres actes inhumains » devait être restrictivement interprété pour exclure les crimes de nature sexuelle, car, selon cette Chambre, l’article 2.g du Statut inclut «toutes autres formes de violence sexuelle ». La Chambre avait estimé que le Procureur n’avait pas présenté de preuve que le mariage forcé était un crime non sexuel, et que les preuves étaient totalement comprises et « absorbées » dans le crime d’esclavage sexuel. A cet égard, cette Chambre avait considéré que le terme de « femme » utilisé par l’auteur du crime démontrait sa possession de la victime plutôt qu’un statut marital.

Sur appel du Procureur, la Chambre d’appel du TSSL a estimé dans son jugement du 22 février 2008 que ce raisonnement était erroné.

Tout d’abord, les juges ont examiné la portée du crime d’ « autres actes inhumains » et ont conclu, sur la base d’une interprétation téléologique et de la jurisprudence des tribunaux internationaux, que les crimes de nature sexuelle n’en sont nullement exclus. Les juges ont rappelé que le but de cette disposition non exhaustive était précisément d’éviter qu’une liste stricte d’actes permette aux bourreaux de la contourner, en imaginant sans cesse de nouvelles formes d’actes inhumains.

Deuxièmement, la Chambre d’appel a considéré que les auteurs des mariages forcés avaient l’intention d’imposer à leurs victimes une « association conjugale forcée », plutôt que de les soumettre à l’esclavage. Parmi les preuves d’une telle association conjugale, les juges ont retenu celles qui démontraient que des femmes et des jeunes filles avaient été systématiquement enlevées de leurs foyers par les troupes AFRC, forcées à suivre ces troupes, à accomplir des tâches conjugales incluant des relations sexuelles, des travaux domestiques pour le « mari », à accepter des grossesses, et à s’occuper des enfants issus du soit-disant « mariage ». Cette « épouse » était supposée démontrer au « mari » une loyauté totale, ainsi qu’« amour » et affection. En retour, le « mari » était censé pourvoir à la nourriture, aux vêtements et à la protection de sa « femme », y compris contre le viol par les autres combattants. A l’inverse, cette protection -bien que très relative- n’était pas garantie lorsqu’une femme était utilisée uniquement comme esclave sexuelle. Les juges ont noté, et c’est important, que les relatifs bénéfices de cette association conjugale pour les victimes n’équivalaient nullement à un consentement, ni ne changeait la nature criminelle du mariage forcé. De plus, une femme qui n’exécutait pas ses devoirs « conjugaux » risquait des sanctions pouvant aller jusqu’à la mort.

La Chambre d’appel a conclu que la mariage forcé n’est pas « absorbé » par le crime d’esclavage sexuel car les éléments des deux crimes diffèrent, et que le crime de mariage forcé n’est pas nécessairement un crime sexuel, puisque le sexe n’en est pas la seule incidence.

En outre, les juges en appel ont estimé que ces femmes avaient enduré de grandes souffrances non seulement durant le mariage forcé (terreur, abus sexuels et physiques), mais aussi en conséquence d’une telle union (lésions dans le bas ventre, utérus endommagé, maladies vénériennes). Les juges ont aussi relevé la stigmatisation subie par ces femmes, ostracisées par la société sierra léonaise, désignées par les expressions péjorative de « femmes de rebelles » ou d’« épouses de la jungle ». La Chambre d’appel en a conclu que le mariage forcé, dans ce contexte, était de gravité similaire à certains autres crimes contre l’humanité reconnus par le droit international.

Il faut souligner que les juges ont désiré nettement distinguer de tels mariages forcés en temps de conflit ou d’attaque, des mariages arrangés par les familles en temps de paix, selon certaines traditions. Ils ont néanmoins reconnu que les mariages arrangés impliquant des mineurs violent certaines normes de droits de l’homme comme la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination contre les femmes. De tels mariages arrangés n’en sont pas pour autant criminels, à la différence des mariages forcés.

De ce qui précède la Chambre d’appel a conclu que la mariage forcé pouvait être défini comme «une situation où l’auteur, par ses mots ou sa conduite, oblige une personne par la force, la menace de la force ou la contrainte, à être sa partenaire conjugale, engendrant une souffrance sévère ou un dommage à la santé physique, mentale ou psychologique. » Ils ont ajouté qu’au regard des circonstances dans lesquelles ces mariages forcés étaient perpétrés (enlèvement, extrême violence) leurs auteurs ne pouvaient ignorer que leur comportement était criminel.

Ce jugement final du TSSL est donc d’une grande importance et, même si les juges ont mentionné qu’il s’inscrivait dans le contexte spécifique du conflit sierra léonais, il faudra désormais observer attentivement son incidence sur la poursuite des mariages forcés commis dans d’autres régions. Par exemple en Ouganda, des femmes sont enlevées par l’Armée de Résistance du Seigneur et données comme « épouses » à des commandants. Notons encore que la reconnaissance du mariage forcé en tant que crime contre l’humanité permet de le poursuivre également s’il intervient en dehors d’un conflit armé, durant une attaque contre la population civile. C’est un pas de plus contre l’impunité de certains combattants qui profitent d’une situation de non-droit pour infliger ce traitement inhumain à des femmes et des jeunes filles.

Anne Althaus



[*] Cet article a été publié dans le Journal de TRIAL n° 16 (juin 2008, pp. 10-11), disponible à l’adresse web suivante : http://www.trial-ch.org/fileadmin/user_upload/documents/BI/BI16frweb.pdf; © TRIAL et Anne Althaus.



Anne Althaus, ancienne conseillère juridique auprès du Bureau du Procureur du Tribunal spécial pour la Sierra Leone, est
actuellement l’
ICC Programme Adviser auprès de l’Organisation « Redress » à Londres. Les opinions exprimées dans cet
article sont uniquement celles de l’auteur. Elles ne reflètent pas le point de vue et n’engagent ni TRIAL ni les organisations
avec lesquelles l’auteur est liée.


vendredi 23 mai 2008

Félicien Kabuga en Norvège?! Mais que fait la police?


Etrange, très étrange.

L'agence de presse Hirondelle, spécialisée sur le travail du TPIR, annonce dans un article du 22 mai 2008, que Félicien Kabuga, le fugitif le plus recherché par la juridiction chargée de juger les auteurs du génocide de 1994, résiderait en Norvège depuis le mois de mars de cette année.

Si cette information est vérifiée - et à l'heure d'écrire ces lignes, le 23 mai à midi, elle ne l'est pas - le scandale est énorme.

Voilà le principal financier du génocide, recherché depuis 14 ans, que les Suisses ont expulsé en 1994 au lieu de l'arrêté, réfugié au Kenya depuis de longues années, voilà un type dont la tête est mise à prix par les Etats-Unis, et qui résiderait paisiblement en Norvège depuis des mois et négocierait même se reddition avec le Rwanda!!!

Mais que fait donc la police (norvégienne)???

mardi 20 mai 2008

Note de lecture: They Would Never Hurt a Fly (Slavenka Drakulic)


Depuis la Croatie, où elle est née en 1949, jusqu’aux salles d’audiences du Tribunal pénal international pour l’ex-Yougoslavie (TPIY) à La Haye, la journaliste Slavenka Drakulic nous fait partager sa vision du conflit en Yougoslavie et de ses conséquences. Dans They would never hurt a fly (ils ne feraient pas de mal à une mouche), l’auteur nous raconte le conflit yougoslave à travers le point de vue de ses responsables. En y mêlant des éléments de sa vie personnelle, elle démontre que ces personnes, qui se sont rendues coupables des pires atrocités, étaient aussi des gens normaux, avec un passé commun.

Ainsi, elle dresse le portrait de Goran Jelisic, Radislav Krstic, Slobodan Milosevic et son épouse Mirjana Mira Markovic, ou encore ceux de Ratko Mladic, Radovan Karadzic et Biljana Plasvic, la première femme à avoir été condamnée par le TPIY mais également la première à avoir reconnu sa culpabilité. Chez tous ces ‘monstres’, elle révèle une part d’humanité qui amène le lecteur à se demander ce qu’il aurait fait dans une telle situation. Ce questionnement se fait encore plus fort à la lecture du portrait de Drazen Erdemovic, un simple soldat qui, un beau jour, a reçu l’ordre d’exécuter des centaines d’inconnus. En décrivant la gestion de l’après-guerre par le gouvernement croate de Tudjman ou la manière dont est perçue la justice pénale internationale dans les Balkans où certains criminels de guerre sont encore acclamés comme des héros, l’auteur met en exergue les oppositions entre vérité et justice inhérentes à de tels conflits fratricides.

Dans cet ouvrage, Slavenka Drakulic souligne également l’importance des procès, tant pour ceux qui sont morts que pour ceux qui ont survécus. Elle rapporte la vision des victimes et des auteurs et les effets de la justice internationale sur ces personnes à travers des histoires très simples, accentuant ainsi la proximité entre celles-ci et le lecteur.

They would never hurt a fly, de Slavenka Drakulic (en anglais seulement) – Penguin Books, Réimpression (25 octobre 2007), 224 pages, 9€61.